Accéder au contenu principal

Plus de 12 millions de Camerounais sans emploi


D’après l’Institut national de la statistique, 582 319 personnes ont un emploi salarié sur une population active de 13 millions

L’Etat emploie moins de 200.000 agents

Le travail est encore un véritable serpent de mer au Cameroun. Une hydre à mille têtes. C’est la principale leçon à retenir en parcourant le rapport commis par l’INS, après une enquête menée en 2009, et qui fait toujours foi. L’INS apprend ainsi que l’Etat du Cameroun, le premier employeur compte seulement 196.056 agents permanents. Le rapport est muet quant au personnel temporaire employé par l’Etat. D’ailleurs l’INS est assez réservé sur la question. Ce qui n’est pas le cas des statistiques inhérentes au secteur privé qui, après plusieurs décennies, a pour premier employeur la Cameroon development corporation (CDC), avec un peu plus de 13.000 employés dont la plus grande part est constituée d’ouvriers. Au sujet des statistiques en général, on retient que les entreprises recensées lors du dernier recensement général des entreprises (RGE) organisé en 2009 emploient seulement 386 263 travailleurs permanents. Parmi ceux-ci, 281 972 sont des hommes (73%) et 104 291 sont des femmes (27%). En faisant une addition, on se retrouve à 582.319 personnes au total ayant un emploi permanent au Cameroun. Or, d’après toujours l’INS, le Cameroun comptait une population active estimée à 10 millions en 2009. Si on retranche les 582.319 salariées, on est à 9.417.681 personnes de la tranche active dépourvues d’emploi au Cameroun. Donc, d’après les données de l’INS, le Cameroun compte près de 10 millions de chômeurs. « Même en y ajoutant les 43.495 emplois temporaires recensés, on obtient que 429.758 emplois dans le secteur des entreprises, soit 4,3% de la population active estimée », écrit l’INS dans le rapport de 2009.
Rapport de l’Institut national de la statistique (INS) : “Globalement, cette faible capacité d’absorption des entreprises camerounaises, ainsi que de l’Etat, est révélatrice de la fragilité du secteur moderne et de son incapacité à créer des emplois salariés décents pour la majorité de la population active qui trouve finalement refuge dans le secteur informel en exerçant des activités précaires et dégradantes.”

L’INS apprend que les villes de Douala et Yaoundé concentrent 68,4% des effectifs employés et 73,8% du chiffre d’affaires produit par les entreprises. Suivant le milieu, les villes de Douala et Yaoundé concentrent respectivement 47,1 et 21,3% des emplois permanents. Les très petites entreprises et petites n’ont réalisé que 15,4% du chiffre d’affaires total, mais offrent 47,7% des emplois permanents tandis que les moyennes entreprises et grandes entreprises qui dégagent 84,6% du chiffre d’affaires total n’emploient que 51,3% des effectifs. Ce qui, une fois de plus, démontre l’important rôle des TPE (très petites entreprises) et des PE (petites entreprises) dans la création des emplois. «Le Cameroun compte trop d’entreprises qui sont petites pour pourvoir porter la croissance au Cameroun », déplore l’économiste Roger Tsafack Nanfosso. En effet, sur les 93.969 entreprises sont établies au Cameroun, d’après l’INS, le secteur tertiaire vient largement en tête avec 86,5% des unités recensées contre 13,1% pour le secteur secondaire et 0,4% seulement pour le secteur primaire, qui, en réalité crée de la richesse. Et même par types d’entreprises, le secteur tertiaire dame le pion. En effet, les TPE viennent en tête avec 75%, suivies des PE avec 19%, les moyennes entreprises (Me) 5% et les grandes entreprises ferment la queue avec 1% seulement.

Environ 13 millions de Camerounais sont actifs

Avec ces statistiques des plus ridicules, il est quasi impossible de prétendre à l’émergence, « même à l’horizon 2055 », prophétisent quelques experts. Plusieurs analystes économiques sont catégoriques. « Dans ces conditions, il sera difficile de sortir du gouffre tant qu’il n’y aura pas un nombre important de personnes pouvant consommer », soulignent-ils, avant d’ajouter « on est très loin de la barre ». «Il faut préciser qu’il s’agit là des chiffres de 2009. Entretemps, la situation a du évoluer », insistent-ils. En effet, dans son intervention lors de l’assemblée générale d’ECAM (entreprises du Cameroun) le 17 février 2011, le professeur Tsafack Nanfosso a parlé justement d’une population active située autour de 13 millions. Or, les entreprises font rarement les recrutements massifs dans ce pays, et depuis 2009, nombreux sont ceux des Camerounais qui ont perdu leur emploi. Pareillement, l’Etat n’a pas fait une véritable opération d’envergure depuis cette date. La seule grande opération de cette dernière décennie est sans doute l’opération de recrutement des 25.000 diplômés qui, même si elle mérite d’être saluée, est cependant loin de résoudre le problème. Car, en intégrant ce nombre, même multiplié par deux, on ne sera toujours pas à un million de travailleurs permanent au Cameroun.

Pr. Roger Tsafack Nanfosso, économiste : “Les TPE sont très nombreuses, parce que le secteur informel est hypertrophié et excessivement dominant. 94% de la population active est occupée dans l'informel, ce qui est révélateur de profonds dysfonctionnements de l'économie. La question de l'amaigrissement de ce secteur est un sujet majeur qui nécessite une réflexion d'envergure et pas seulement des affirmations tendant à dire qu'il faut formaliser l'informel. Le vrai débat est ailleurs: pourquoi monsieur tout-le-monde qui veut créer une entreprise préfère l'informel au formel? La réponse à cette question donnera la solution au problème.”

L’économiste déplore aussi la faiblesse dans l’ensemble des entreprises camerounaises, qui, de part leur structuration, sont loin dans leur majorité de faire l’affaire. Tenez, le Cameroun compte plus de 75% de TPE employant au trop cinq personnes. « Ce n'est pas une question de nombre, mais plutôt une question de richesses créées. La richesse se déploie au minimum à quatre niveaux: l'investissement, la valeur ajoutée, l'emploi et la fortune. Si les entreprises, quels que soient leur nombre, couvrent de manière satisfaisante ces dimensions et contribuent à la croissance et au développement, leur nombre importe mais pas de manière exclusive. 10 entreprises peuvent impacter une économie davantage que 100 entreprises », commente le Pr. Roger Tsafack Nanfosso.


Commentaires

  1. Un article à ne pas regretter et même à suggèrer aux autres, je vais le faire passer à mes contacts dans les résaux sociaux car j'ai bien aimé le sujet, félicitaion pour le niveau et bon courage !!

    RépondreSupprimer

Enregistrer un commentaire

Posts les plus consultés de ce blog

À qui profite la parité fixe entre le franc cfa et l’euro ?

Quand il s’agit de répondre à cette question, deux écoles se distinguent. La première, minoritaire estime que la parité fixe est avantageuse pour les États de la zone CFA, avec notamment la maîtrise de l’inflation et la stabilité macroéconomique. Certains dissent meme que La volonté de rompre avec ce système relève de raisons plus politiques et symboliques qu’économiques, et qu’ on voit bien qu’aujourd’hui les grandes zones économiques, que ce soit en Asie ou ailleurs en Afrique, recherchent une stabilité de leur monnaie par rapport à celles de leurs principaux partenaires commerciaux. Reste que le bilan de plusieurs décennies de cette parité fixe n’est guère reluisant. La croissance, moteur du développement économique, est limitée (elle sera de 6 % pour l’Afrique de l’Est en 2010-2011, contre 4 % pour la zone CFA), et la grande majorité des pays concernés comptent parmi les plus pauvres du monde. D’où le deuxième courant, issu des milieux intellectuels et économiques africains, qui

portrait:Docteur Samia Shimi

Depuis quelques mois, le docteur Samia Shimi est  médecin généraliste, Ce lundi matin, elle me reçoit , pour une interview sur son métier. Avec le sourire, elle se prête aimablement au petit jeu des questions-réponses de af-media, et revient sur le parcours qu’elle a effectué jusqu’aujourd’hui.     af-media:Quel a été votre cursus scolaire, pour devenir médecin ? - J’ai d’abord obtenu un baccalauréat scientifique au maroc,  BAC D (spécialité Sciences Naturelles), puis je me suis orientée vers des études de médecine. Après huit ans, j’ai obtenu mon diplôme.  af-media:Comment se sont déroulées vos études ? - En plus des cours, nous devions effectuer, à partir de la quatrième année, des stages en milieu hospitalier. Tous les matins et pendant  des mois durant , nous étions donc en immersion dans le milieu professionnel. Les stages se déroulent par cycles de quatre mois et au bout de cette période, nous étions affectés à un autre service, afin de découvrir tous les secteurs de la profes

Amnesty international épingle le Cameroun

Amnesty International dénonce une fois de plus, dans un rapport publié ce jeudi 24 janvier, les violations des droits humains au Cameroun. Le jour même où Paul Biya effectue une visite en France... Le Cameroun avait fait un pas en avant en matière de droits humains, avec l'acquittement au début de janvier de deux jeunes gens accusés du délit d'homosexualité. Mais Amnesty International n'a pas été tendre avec le pouvoir de Paul Biya en publiant ce jeudi 24 janvier un nouveau rapport faisant état de graves violations des droits de l'homme. L'ONG a déploré, entre autres, des exécutions illégales, de mauvaises conditions carcérales, le musellement d'opposants et de journalistes ainsi que des attaques contres les homosexuels. À encroire les auteurs du rapport, le cas de Franky et Jonas, deux jeunes hommes de 23 et 22 ans - condamnés pour homosexualité en première instance puis acquittés en appel le 7 janvier au tribunal de Yaoundé -, semble l'exception plutôt que